Viser plus haut
La fête de tous les saints est en grande partie méconnue et pas seulement à cause d’Halloween qui joue la confusion depuis plusieurs années. La beauté de la Toussaint est ignorée car notre monde a peu à peu imposé à nos vies un horizon très bas. Notre société de consommation a réussi à nous convaincre qu’il ne fallait pas viser plus haut que la satisfaction de nos envies passagères… Elle a peu à peu désenchanté le monde et anesthésié le désir de l’homme ; le désir infini que Dieu a mis au cœur de l’homme.
Si nous faisions un sondage sur ce sujet, il ne fait aucun doute qu’une écrasante majorité de nos contemporains déclareraient que le but ultime de leur vie, c’est de trouver le bonheur. Et l’on peut comprendre bien entendu cette aspiration. Mais voilà, le mot « bonheur » cache un malentendu…
Les écrans publicitaires nous vendent un « bonheur » carte postale en forme de grosse cylindrée, de belle maison - si possible avec piscine - de corps de rêve et de vacances au ski. Mais même lorsqu’elle n’est pas aussi caricaturale, l’idée du bonheur comme horizon de la vie nous mène à l’impasse. Même lorsqu’il s’agit de réussir sa vie conjugale, d’être épanoui dans sa profession, d’aimer ses enfants, de faire le bien, il me semble que nous visons encore trop bas. Bien sûr, toutes ces choses sont profondément bonnes et souhaitables. Mais ce n'est pas là, je crois, le but ultime de la vie. Le but de la vie, c’est Dieu et rien d’autre ! Si bien que, lorsque nous connaissons l’échec sur des sujets aussi essentiels, ce n’est jamais l’échec de notre vie. Combien de personnes ont le sentiment amer d'avoir raté leur vie ! Mais pour Dieu, nous valons infiniment plus que nos échecs ou nos réussites…
Il en faut du temps pour découvrir cela. Il en faut du temps pour accepter que ce que nous avions, dans un premier temps, considéré comme la fin ultime de notre vie, n’était en réalité qu’une étape et non la destination. Il en faut du temps pour reconnaître que l'échec de nos projets - aussi beaux soient-ils - ce n'est jamais l'échec de notre vie. Rater une étape, ce n'est pas manquer le sommet et trébucher ce n'est pas être vaincu. Il nous faut réapprendre à désirer le seul sommet à la hauteur de l'homme ; à désirer la sainteté et rien de moins ! Ne désirer que le bonheur, c’est ne pas voir plus loin que le bout de sa vie ; c’est viser trop bas. Mais désirer la sainteté, c’est désirer Dieu !
Cette semaine, en célébrant tous les saints, c’est précisément cela qu’il faut demander à Dieu : le désir de la sainteté ! Il nous faut retrouver le désir profond, le désir absolu que Dieu a mis au fond de nous, le désir fou de l'enfant que nous avons été. Et si nous nous sommes laissé endormir dans la médiocrité de nos petits arrangements ou de nos grandes démissions, il n'est jamais trop tard pour nous réveiller et laisser Dieu rallumer en nous ce feu. Il n’est pas besoin d’être un héros ni un parfait pour devenir saint ; juste le désir de Dieu et l’audace de viser plus haut !
Pierre Alain Lejeune
1er novembre 2022
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